Brunot Doucet, un chef bien dans l'air du temps

En 2004, lorsque Bruno Doucet rachète La Régalade de l'avenue Jean-Moulin à son créateur Yves Camdeborde, on croyait déjà la bistronomie rendue à son zénith.
Tous les grands chefs avaient déjà emboîté le pas de cette vogue quasi-libertaire, de cette gastronomie détendue du col et libérée de ses additions à la Crésus, en ouvrant des annexes encanaillées de leurs tables étoilées.

Mais les années 2010 on prouvé que le filon était loin d'être tari, avec une nouvelle vague d'aventuriers des fourneaux (dont les bancs ont d'ailleurs été assez largement comblés par les candidats des saisons successives de Top Chef).

Pourtant, une partie de cette nouvelle génération m'apparaît différente.
La notoriété du chef a pris le pas sur le « produit star », les additions se remettent à gonfler et la bistronomie s'est peu à peu mutée en une « slash cuisine » où la déstructuration et le minimalisme font loi.

On ne mange plus un « Boeuf Bourguignon », mais un « Boeuf / Carotte / Vin Rouge ».
L'incontournable « tarte au citron » est rebaptisée « sablé / crème citron / meringue ».

Et malgré ses quelques années en plus, avec sa barbe plus longue lui donnant des faux airs de « Dutournier jeune », Bruno Doucet lui, ne change pas une équipe qui gagne et c'est non pas une, mais deux nouvelles Régalades qu'il ouvre en 2010 (rue Saint-Honoré), puis en 2012... à l'Hôtel de Nell à Paris 9ème.

Se payer un restaurant dans un hôtel 5 étoiles sans faire la course aux fameux macarons Michelin, c'est peut-être finalement ça, le vrai luxe ?

Un cadre chic et chaleureux signé Wilmotte...

Et ça n'est pas non plus le cadre, parfaitement réussi par Jean-Michel Wilmotte, qui nous donnera la folie des grandeurs.

La régalade conservatoire est un endroit certes chic, mais suffisamment accueillant et chaleureux pour que l'on ne regrette pas d'être venu sans sa cravate et ses boutons de manchette.

Sol en damiers, murs et tables aux couleurs sobres et chaleureuses dans les tons anthracite, chaises en bois clair.
Tout cela nous plaît bien... Mettons-nous donc à table !

La terrine maison en amuse bouche, servie à discrétion.

Nous sommes deux, et nous avons faim.

Nous demandons quelque chose à grignoter pour accompagner nos margaritas (15 €). Qu'à cela ne tienne, on nous amène déjà la généreuse terrine servie en amuse bouche (et à discrétion) dans le cadre de l'unique menu-carte à 37 €, escortée d'un pain de campagne irréprochable.

Une bien bonne idée. Nous finissons donc nos cocktails et optons pour deux verres de côtes de Provence « Commanderie de Peyrassol » (8 €) pour accompagner la terrine.
Sur la page des vins aux verres, si les cépages sont détaillés (encore une bonne idée), aucun millésime n'est en revanche indiqué.
Dommage, mais pas trop grave : nous allons piocher l'info sur la partie de la carte consacrée aux vins en bouteille. C'est un 2014.

Risotto crémeux à l’encre de seiche, gambas rôties à l’ail, émulsion de vache qui rit

Place aux entrées. Pour moi, c'est le risotto crémeux à l’encre de seiche, gambas rôties à l’ail, émulsion de vache qui rit.

L'ensemble est parfait. Les saveurs se marient étonnamment bien (je n'aurais pourtant pas parié un seul kopeck sur l'association encre de seiche / vache qui rit). Seul bémol : les gambas ont été inutilement coupées en deux dans leur longueur avant d'être rôties et se retrouvent donc un peu sur-cuites.

Compotée de poivrons et poêlée d'encornets au chorizo

Sur l'ardoise des suggestions du jour, ma convive choisit une compotée de poivrons et poêlée d'encornets au chorizo. Une alliance sans risques, certes, mais diaboliquement bonne.

D'autant que les encornets, parfaitement cuits, sont bien tendres et le chorizo parfaitement dosé pour amener juste ce qu'il faut de gras et d'épices à l'ensemble.

Poitrine de cochon caramélisée de chez Ospital

Pour le plat, mon choix n'a pas été difficile : il m'a suffi de lire « poitrine de cochon » et « de chez Ospital » pour que l'affaire soit entendue... une superbe viande accompagnée de choux romanesco.

L'intuition était bonne. La poitrine de cochon, quand elle est parfaitement cuite (c'est ici le cas) m'apparaît comme totalement addictive. La couenne croque un peu sous la dent, puis se met à fondre avec la chair. Un vrai grand plat bistronomique.

Veau en deux cuissons

De son côté, mon invitée se régale d'un veau en deux cuissons : le quasi rôti, et une caillette au jus de veau, joliment bombée, mais qui aurait, à mon goût, mérité un assaisonnement un peu plus marqué.

Le tout est accompagné de légumes de saison parfaitement cuits et bien enrobés dans le jus de veau, et de quelques pousses de roquette.

Le baba au Rhum

Et comme nous sommes dimanche, le baba au rhum est à la carte (ça marche aussi le samedi).

La pâte à savarin est goûteuse, sucrée juste ce qu'il faut, mais un peu dense. En fait, c'est moi qui suis trop pressé : une fois le baba bien imbibé de rhum, il fond dans la bouche. Un délice. Il est servi avec quelques fruits rouges (mûres, groseilles, fraises...), histoire d'apporter un peu de mâche et d'acidité à l'ensemble. Ça fonctionne plutôt bien.

Pêche plate du Lot-et-Garonne cuite au four

En face, ma convive se régale d'une originale pêche plate du Lot-et-Garonne cuite au four, servie avec une émulsion de verveine et un sorbet pêche. Un dessert gourmand et de saison.

Très belle carte de vins bien choisis et parfaitement commentés (millésimes, producteurs, cépages, notes de dégustation...) et à prix plutôt sages, comme ce Cheverny Domaine de Veilloux 2010 de chez Michel Queioux à 23 €.

Notre verdict ? La Régalade n'usurpe pas son nom et reste l'un des plus beaux rapports qualité-prix de la capitale. Vous comprendrez donc qu'il est prudent d'y réserver votre table au préalable !

On y mange...

Entrées :
- Risotto à l'encre et gambas rôties
- Compotée de poivrons et poêlée d'encornets au chorizo

Plats :
- Filet de rascasse en bouillabaisse
- Poitrine de cochon caramélisée

Desserts :
- Riz au lait « grand-mère »
- Soufflé chaud au Grand-Marnier
- Baba au Rhum

Horaires d'ouverture

Ouvert tous les jours
de 12h00 à 15h00
et de 19h00 à 22h30


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